Constitution et contradictions : Maître Patrick Nsasa appelle à un réveil juridique salutaire

Mardi dernier, au cœur du Silikin Village de Kinshasa, Maître Patrick Nsasa, figure lucide et engagée de l’Association Africaine des Droits de l’Homme (ASADHO), a ouvertement critiqué la torpeur juridique dans laquelle s’enferme la Cour constitutionnelle congolaise. En bon juriste, il n’a pas mâché ses mots : la plus haute juridiction du pays semble atteinte d’une cécité volontaire face aux instruments internationaux de protection des droits humains. Et pourtant, la Constitution congolaise, dans son article 215, ne laisse aucune ambiguïté : le droit international ratifié prime sur le droit interne. Hélas, cette hiérarchie des normes reste un vœu pieux dans l’enceinte de la Cour.Dans un exposé limpide et alarmant, Me Patrick Nsasa a mis le doigt sur une plaie purulente : l’absence totale de référence aux textes internationaux dans les arrêts de la Cour, même lorsqu’il s’agit de droits que nul État digne de ce nom ne devrait piétiner, même en état d’urgence.

Le droit à la vie, l’interdiction de la torture, le droit à un procès équitable : autant de balises constitutionnelles que les juges semblent interpréter comme des suggestions facultatives. De quoi donner des sueurs froides aux défenseurs des droits humains, surtout lorsque ces oublis volontaires coïncident avec des décisions jugées politiquement orientées.Certes, cet expert en droit a reconnu quelques efforts: comme la faculté de la Cour à bloquer certaines lois inconstitutionnelles ou à consacrer progressivement des principes démocratiques fondamentaux. Mais ces avancées sont bien maigres face aux carences structurelles. L’absence d’un recours individuel direct transforme la Cour en une forteresse inaccessible pour le citoyen lambda. Mais l’espoir ne meurt jamais sous la toge de Me Nsasa. Fidèle à sa vocation de bâtisseur, il propose une réforme de fond : ouverture d’un recours individuel, renforcement de la formation des juges en droits humains, obligation de motiver les arrêts à l’aune des normes internationales, et création d’un véritable dialogue entre la Cour et les acteurs de la société civile. Des propositions concrètes, courageuses, et essentielles. En somme, au cours de cette journée riche en échanges constructifs, il ne s’est pas contenté de dénoncer l’obscurité, mais, il a également allumé une lampe. Reste à savoir si la Cour daignera ouvrir les yeux.

Ludovick Iwele

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